27/12/2009

Rumi


Heureux l'instant où
nous nous assiérons
dans le palais
toi et moi
Avec deux formes et deux visages
mais une seule âme,
toi et moi,
et quand nous entrerons dans le jardin,
toi et moi,
Nous resterons unis dans l'extase
par les mots, par le silence,
toi et moi
Et les oiseaux du ciel envieront nos fous rires
et l'allégresse de nos coeurs,
toi et moi
Mais le prodige
c'est qu'unis en ce même lieu
Nous soyons en ce moment même
l'un en Irak et l'autreà Khorassan,
toi et moi...


22/12/2009

Un amoureux du 7e siècle, Isaac le Syrien


De partout vient la réjouissance.
Des ténèbres, la lumière.
De la pauvreté, la richesse.
De la bousculade, la solitude silencieuse.
Du désespoir, la sérénité
et le renouveau de l'espérance.
J'ai disparu de la terre.
La croissance n'a pas de fin. La vie est à nous. Et la mort est à nous. Nous vivons pour mourir. Nous vivons pour nous dilater, pour pouvoir épouser la mort, l'ensevelissement , la perte de toutes choses. Ainsi nous les gagnons toutes. Nous les trouvons. Absents, éloignés, inexistants, nous existons avec elles, et par elles.
Nous sommes enfermés dans la prison du siècle présent, dans les murs des apparences, dans la stérélité du relatif, dans l'aphonie du mouvement et de la vie mécanique.
La vraie musique émerge du cheminement. Le mouvement est prière. Le cheminement est contemplation.
L'extension est réjouissance.
Le dépassement est expression, Verbe, Pâque, Christ.

13/12/2009

Une amoureuse du 13e siècle


"Penser ne vaut ici plus rien
ni oeuvrer, ni parler.
Amour me tire si haut.
-Penser ne vaut ici plus rien-
Par ses divins regards,
Que je n'ai nul désir.
-Penser ne vaut ici plus rien-
Ni oeuvrer, ni parler."

Marguerite Porete
"Le miroir des âmes simples et anéanties"

Rumi



"Je regarde dans le coeur,
la parole n'est que l'accident.
La parole est comme un ruisseau
face à l'océan;
je me tais
car c'est un feu en moi."




11/12/2009


"Nous ne pouvons
rester seuls
avec la merveille.

Il n'y a de réponse
à la merveille
que la communion."

Jean Biès

De l'émerveillement



"Au coeur de l'émerveillement affleure l'action de grâce,_ un délire de paroles silencieuses parfois, qui louangent et rendent gloire.
Car l'émerveillement offre trop de limpidité pour pouvoir s'organiser en édifices d'idées ou en réflexions attiédies."

Jean Biès


"Les concepts créent les idoles de Dieu; seul l'émerveillement peut nous en dire
quelque chose
"
Grégoire de Nysse.

09/12/2009

Peinture de John Martin, (1789-1854)

Ecrit en 1828, l'Enfant d'Amour


"Les puissances de la terre mettent tout en oeuvre, aujourd'hui comme de tous les temps, pour que les peuples s'endorment dans leur fausse sécurité; elles craignent la destruction de leur ordre des choses, et pour mieux le conserver, elles inspirent tous les enfants de la terre, essentiellement mus par l'esprit de la colère ou d'égoïsme, à prêcher littéralement la morale de leur vainqueur, persuadés qu'à l'ombre de cette lettre morte, leur odieuse doctrine produira mieux ses fruits.

La lumière est donc ce que l'être qui la sollicite, la fait être; toujours un voile de gloire et de splendeur, lorsque c'est l'amour qui la fait briller, comme il en parut sur le Thabor, un léger crépuscule..."


" Il ne faut point nous figurer qu'il y a que nous "chrétiens" de nom, qui ayons la connaissance d'un rédempteur, de Satan le dominateur par la colère, de Lucifer prince déchu de la lumière, etc. Chez chaque peuple et à diverses époques, les voiles des différents mystères ont été déchirés, selon la nature de la source que les nations ont fait bouillonner en divers temps et en divers lieux.
Tout est à jamais l'un dans l'autre et l'un par l'autre; Dieu est en tout, et tout est Lui-même."

" De même que l'Enfant d'Amour trouve les cieux et toutes les légions célestes au premier pas qu'il fait dans l'abîme infernal,
de même l'enfant de la colère trouve l'enfer et toutes ses furies au premier pas qu'il fait pour entrer dans les cieux..."

Louis Mure-Latour








03/12/2009

Luc Olivier d'Algange



"...L'écriture traverse les confins des signes en hiver.
Condamnant l'Automne antique de mes fleuves
Tu vins mourir dans l'angélus des rousseurs
Lors dans les buissons lointains et les fragments purs
Le déclin des sentinelles cerna nos prophéties
Aux antichambres de la mort l'astre devint rouge
Et novembre vint bénir les sablières incolores
Nous glissions sur les ardoises de Walpurgis
Etreignant contre notre âme blanche l'épouvante bleue,
Comme inclinant contre l'outre-monde la robe artérielle de l'aube
Et nos gestes si noirs soudain contre l'opacité de leur corps..."

Jean Bies


"Immobilisation de l'être,
gel de toutes les facultés,
la stupeur met l'âme à l'arrêt,
devant les gouffres imprévisibles
dont ont été retirés
les marches, les repères, les entraves à la chute.

Elle est pétrie d'effroi,
de détresse,
d'un bonheur intraduisible,
semblable à un chagrin frustré de toute consolation,
à une joie privée de langage.

29/11/2009

Yeux de feu


Des yeux de feu tournent
dans la nuit noire
deux puits incendiés d'or
veillent
telles des sentinelles d'aurore

Un léger frémissement alerte mon coeur
aussi léger qu'un souffle d'aube chaude
vacille et m'attire
vers l'ombre de moi-même
aussi claire
qu'un soleil haut levé

A l'envers palpite ma vie
comme au creux d'une main
un oiseau encore épris
de vertige
gémit
et tournoie vers le ciel

Ce ciel miroité
du fond même de l'obscur
me chavire toute entière
et ne me retient plus
je sombre
éclatée de lumière.

Maïa de Soles

26/11/2009

Jean Biès : "De la stupeur"


" Parce que le système des certitudes rassurantes, des vérités maintenant bafouées s'effondre devant elle, la stupeur, à l'instar du "satori", fait l'expérience du vide : un vide soudain qui se présente, nie tout ce qui le précède, n'émeut pas seulement : désoriente, égare, réduit à rien.
La stupeur n'est pas en mesure de nommer, d'avancer sur une terre ferme ; elle perd brusquement tout appui.
Ni la vigueur de l'étonnement qui fuse, ni la magie enveloppante de l'émerveillement ne l'étançonnent : privée de points de comparaison, d'articulations syntaxiques, d'images, de symboles, elle est ce qui trahit le moins l'intraduisible, ignore le moins l'inconnaissable.
Comme le "satori", elle rejoint la conscience de la non-dualité, l'état illuminé où la suprême Sophia réalise sa propre nature. Elle est adhésion, adhérence à l'Un ; par là même s'abolit elle-même."



Jean Bies



" L'étonnement éveille,
l'émerveillement vivifie,
la stupeur anéantit.

L'étonnement découvre Dieu
l'émerveillement l'admire,
la stupeur fait qu'on Le devient"

24/11/2009

Jadis, chez les grecs,


Un seul mot pouvait selon le contexte signifier
à la fois
étonnement, émerveillement, stupeur :
thaumazeïn ( grec ancien).
En ce mot se discernait l'origine même de la philosophie.
Du temps où la philosophie était inséparable de la poésie:
"l'une et l'autre portées ensemble par une gnose transpersonnelle et translogique,
qui dépasse l'épaisseur du monde
pour rejoindre la Réalité."
D'après Jean Biès.


Il n'y a pas de recette politique,
il n'y a pas de solution matérielle,
il n'y a qu'une révolution,
celle du retournement,
celle du retournement à l'homme pneumatique,
à l'homme dont le coeur rayonne comme un feu
pour éclairer l'autre,
dont le coeur est fontaine,
fontaine et source jaillissante,

Il suffit
d'un geste
d'un regard
pour rappeler
le bruissement d'un coeur
en ce monde d'opacité,
où la seule angoisse,
le seul cri,
la seule question à poser
ne serait ce pas :
Y a-t-il quelqu'un ?

19/11/2009


Une société qui n'a plus de place
pour ses pauvres
est une société morte
perdue,
car condamnée par elle-même,
une société qui ne reconnait plus ses pauvres
est une société où l'homme ne sait plus qui il est,
car le premier pauvre est soi-même;

Quand on ne sait plus cela :
que sait on encore ?
quand on n'est plus capable
de descendre
plus bas que soi-même
on devient l'exclu de soi-même

Une société qui exclut est inhumaine
Pauvre homme qui exclut les égarés de ce monde,
car il a oublié le grand exil...
De "là-bas" d'où il vient
qu'il rejette

Car à ce "là-bas"
il n'y a pas de nom
de ce "là-bas"
demeure juste un chant
enfoui sous mille brisures
d'éclats si durs
Ce là-bas
était chez lui,
est chez lui...

29/10/2009

Du petit sentier qui mène à la demeure de l'ermite


"L'Ange de la présence" avec Luc Olivier d'Algange


"Voir les signes du monde et le monde des signes
à la lumière de l'Ange
suppose cette conquête du
"supra-sensible concret"
qui n'appartient ni au monde matériel
ni au monde de l'abstraction,
mais à la présence même,
qui selon la formule d'Héraclite
"ne voile point, ne dévoile point, mais fait signe"
Or si tout signe est signe d'éternité
la chance prodigieuse nous est offerte
de lire les oeuvres, non plus au passé
comme s'y emploient les historiographes profanes et les fondamentalistes
mais bien au présent
à la lumière matutinale de l'Ange de la présence,
témoin céleste de l'avènement
herméneutique qui,
souligne Henry Corbin"
"implique justement la rupture avec le collectif,
la rejonction avec la dimension transcendante
qui prémunit individuellement la personne
contre les sollicitations du collectif,
c'est à dire contre toute socialisation du spirituel."

Crépuscule


Le jour, la nuit : Henry Corbin


"Le jour alterne , comme alternent deux contrastes qui par essence
ne peuvent coexister.
Lumière se levant à l'orient, et lumière déclinant à l'occident :
deux prémonitions d'une option existentielle entre le monde du jour et ses normes
et le monde de la nuit
avec sa passion profonde et inassouvissable.
Tout au plus, à leur limite, un double crépuscule :
crépusculum vesperinum
qui n'est plus le jour, et qui n'est pas encore la nuit;
crepusculum matutinum
qui n'est plus la nuit et n'est pas encore le jour.
C'est par cette image saisissante, on le sait, que Luther définissait l'être de l'homme."

26/10/2009

Plus le temps


On n'a plus le temps
plus le temps d'écouter,
le temps de laisser
le chant
descendre jusqu'au coeur

La terre se meurt

Ceux là nous sauveront
qui savent écouter
les notes
qui mènent
aux sources

Parce qu'ils furent silence,
ils surent écouter
ce qui passe de la terre au ciel
du ciel à la terre,

parce qu'ils savent
encore chanter comme prier
parce qu'ils savent aimer
chanter comme aimer,
aimer comme chanter

Ceux là qui savent
la terre, le ciel
,
ceux là qui ont des ailes pour voler,
pour passer de ce monde à l'autre

Ceux là sauveront la terre
ceux là,qui si loin de notre coeur de fer
sèment
des notes,
comme des gouttes de lumière,

Ceux là ensemencent la terre comme au ciel
Maïa de Soles

La grotte de l'ermite.

D'Olivier Clément



"La véritable aliénation de l'homme, son vrai péché est sa prétention
de se sauver lui-même.
Pour se sauver, il faut se perdre, et de toute sécurité,
y compris la sécurité pharisaïque de la loi."




24/10/2009

L'automne par ici

Quelque chose d'Alain Fournier


Découverte de cet homme qui lisait et écrivait
"comme on s'enfuit".

De cet homme rebelle, fort et tendre qui a déserté la vie en devenant lieutenant, car il avait perdu son amour.
Immersion dans l'enfer total où les jours ternes, les travaux bêtes et absurdes s'entassaient les un sur les autres, où ses collègues ,aussi célibataires," sont mornes, leur vulgarité incurable,leur contentement d'eux-mêmes absolu."

D'autre part sur ce fond de ciel gris, fermé, triste, cet "Henri" a le don du réenchantement : il trouve la petite porte à ouvrir pour laisser passer le bruissement d'une source secrète et nous invite ainsi à" l'échapée" du destin avec une évocation délicieuse d'un paradis qui se trouvait là, si près, à portée d'un visage d'enfant, ou ce regard là d'un soldat égaré qui sait encore que son nom porte une âme.

Cet homme survit dans un camp, celui de la discipline militaire, là où il est interdit de réfléchir, comme de mourir déjà avant de mourir.
Et pourtant c'était un amoureux , un immense amoureux. Celui qui est capable au matin d'écouter avec la femme d'une nuit , d'écouter avec elle le chant du rossignol. Et c'est la grâce, l'immersion de la beauté du chant de la vie :


"Se renversant sur le lit, elle lui dit d'écouter
.Et soudain, une voix éclate tout près d'eux, dans le jardin et "cela monte avec une joie qui soulève, avec une confiance qui fait sourire, avec une pureté qui désinfecterait l'enfer." C'était le chant du rossignol.
"..;la femme, comme quelqu'un qui a vu dans un champ, bien des fois, sans en parler, le conciliabule des anges et qui vous rassure, en le traversant avec vous, sourit et me dit "toutes les nuits, il est là". Maintenant que je suis avec elle et que je lui donne la main, elle ne sent plus cette peur qui me fait, moi, claquer des dents. Nous ne respirons plus, nous écoutons au fond de la nuit chanter l'âme."
Dans biographie de Violène Massenet "Alain Fournier"

Peut être avons nous oublié notre vocation première en ce monde : celle d'être des pèlerins ?

22/10/2009

Un visionnaire : Berdieaff

Ce fut écrit il y a plus d'un demi siècle :

"Le socialisme est bourgeois selon l'esprit.
Le bourgeois, c'est la pesanteur du monde et le souffle léger de liberté spirituelle lui est opposé.
L'appétit trop intense de la vie produit de la pesanteur, de même que l'attachement aux réalisations et aux biens terrestres.
Le bourgeois ignore les instants de contemplation libératrice, il n'est pas conscient du côté profondément tragique de la vie et rejette la tragédie."

"L'accroissement de la population, le développement illimité des besoins, la soif de puissance et de domination ont abouti à la victoire spirituelle du bourgeoisisme dont les époques antérieures n'ont connu que les germes, sur lesquels les prophètes ont jeté la lumière. Celle civilisation ne saurait durer éternellement.

Une société bourgeoise est une société non spiritualisée. "
Berdieaff

14/10/2009

La beauté


La beauté pleure...
Encore plus
belle
parce que si triste
au coeur de sa nuit profonde
Elle se pare de ses larmes
comme d'une chevelure
longue et noire
qui n'en finit pas de tomber.
Nue
aux pieds de l'ombre
même des lys pourpres
des temps oubliés,
des temps oubliés de l'éternité,
des temps jetés au temps,
des temps enfouis
sous couche de fer,
sous couche de verre,
sous la dureté des parures
qui ne savent plus l'éclat,
qui ne savent plus l'enluminure
des grottes qui ne sont plus
que sous terre
sans plus aucune lumière,
trop blindées d'elles-mêmes
ne savent plus
la saveur
d'être vulnérables et brisées...

Maïa de Soles

07/10/2009

Un monde meilleur ?



Rien de plus pernicieux et dangereux que de vouloir au nom d'une rationalisation de l'existence, vouloir constituer l'harmonie d'un paradis terrestre qui serait à venir.
De là, l'erreur fatale de toute dictature.
Tant qu'on ne prévoit pas l'imprévisible de la liberté humaine, on se cogne à l'impasse d'un montage humain infernal.

Combien l'homme n'est il pas capable d'inventer son propre enfer...

A l'entrée d'un lieu

Du nouvel ordre mondial


C'est la nouvelle dictature que tout le monde accepte ou presque. Disons que toute voie qui n'entre pas dans cet ordre est vite tue par le bruit de ce monde.
C'est un monde qui n'aime pas l'ailleurs, qui n'aime pas le rêve, qui n'aime pas la fantaisie, ou celle qui frise une telle vulgarité qu'on ne réalise même plus combien on se complaît dans la banalité...
C'est un monde qui n'aime pas le silence
, les légendes, la mystère, le secret, et le sacré.
Un monde de comptes.
Il n'y a plus d'âme, qu'une antichambre de droit et de devoir.
Un coeur passé au rouleau compresseur de nos édifices citoyens.

Un monde qui n'aime pas les miracles, car cela est perturbant.

Et pourtant
La vie n'est que miracle, que jaillissement, que nouveauté, qu'instant de fulgurance d'où jaillit l'éternité...
Mais cela est dérangeant,
cela fait désordre...

Que reste-il ? Que restera-t-il de nos vaines agitations pour le pouvoir, pour le paraître ?

De cette religion de puissance ?


25/09/2009

Rêverie



Un monde si proche, si inconnu
m'entoure et me cerne
tel l'attouchement d'une aile
très lointaine,

un frémissement,
qui se niche au creux
du coeur
dépourvu de toute idée,

Un pleur secret
se glisse
ou mieux remonte
des profondeurs

Un regard a plongé
dans la nuit
droit comme une étincelle
du plus obscur des temps

Une flamme
brûlante
comme un sanglot
de trop d'amour...

Maïa de Soles



Serait on des esclaves, nous les nantis ? De Nicholas Berdieaff

" Le bourgeoisisme, c'est l'esclavage de l'esprit figé, accaparé par le monde extérieur, c'est la dépendance du temporel périssable et l'incapacité de trouver une issue vers l'éternel.
Le bourgeois (disons, le citoyen responsable manager et si raisonnable) est esclave du palpable, de ce qui vient du dehors. Il ne peut exister sans autorité extérieure et c'est pour lui en premier lieu que l'autorité a été créée. S'il lui arrive de la renverser, il s'en crée immédiatement une autre, pour s'y soumettre.
L'ardeur spirituelle, l'activité créatrice lui font défaut. Son propre esprit étant étouffé et pétrifié, il ne croit pas en l'Esprit."
Nicholas Berdieaff

De ceux qui errent parce qu'ils ont une âme

De l'esprit bourgeois. De Nicholas Berdieaff


"Le grand malheur, c'est que tout tend à l'objectivation : l'Etat, l'Eglise, Dieu, l'Esprit, la religion, la science, la technique, la philosophie. Tout devient objet sans lien intime avec la personne humaine. L'embourgeoisement est la conséquence de l'objectivation de l'esprit."

La volonté de sainteté et de génie s'éteint et le soif de domination, le désir d'une existence confortable prennent le dessus. Les plus hautes ascensions spirituelles appartiennent aux époques révolues. Le temps de la décadence spirituelle correspond à celui du triomphe bourgeois.
Les figures de chevalier et de moine, de philosophe et de poète, sont remplacées par celle du "bourgeois" (aujourd'hui, on l'appellerait : citoyen) assoiffé de domination universelle, conquérant, organisateur et businessman.
Le centre de la vie se déplace.

L'ordre organique et hiérarchique étant transgressé, le centre vital est transféré à la périphérie. Telle est l'époque de la civilisation mécanique, industrielle et capitaliste d'Europe et d'Amérique.

Quelles sont les racines spirituelles du bourgeoisisme ?
C'est la croyance tenace en ce monde visible et l'incrédulité vis à vis de l'invisible. Le bourgeois est saisi par les choses visibles et tangibles, il en est frappé et séduit. La foi en une autre réalité, en la vie spirituelle, il ne la prend pas au sérieux...

Le bourgeois est un réaliste naïf, et seule une idéologie naïvement réaliste lui paraît sérieuse."


Nicholas Berdieaff, en 1948

Question


"La question se pose de savoir
si l'être auquel
appartient l'avenir
continuera à s'appeler homme"

Berdieaff

15/09/2009




"Tout est sceau;
tout est miroir;
tout, pourtant,
est voilé
au regard brouillé"
Melchior Lechter







La sagesse se reconnaît en
ce qui est petit,
car elle sait y discerner
ce qui est grand






Tout le visible tient à l'Invisible
L'audible à l'inaudible
Le tangible à l'intangible.
Et peut-être le pensable à l'impensable

Novalis

21/08/2009


"Deux types d'hommes se partagent la terre_ les nerveux et les contemplatifs. Ils ont chacun leur rôle. Les nerveux remontent les ressorts des horloges du monde. Les contemplatifs s'émerveillent des sujets gravés sur les balanciers.
Leur émerveillement ouvre une porte dérobée dans l'invisible, quand les nerveux finissent par briser les clés dans les serrures."
Christian Bobin

Ni revendication, ni résignation


Mais descendre,
descendre,
descendre,
au plus profond,
du lac de l'âme,
où crépite la flamme,
où se nouent
le sanglot
et l'aile du monde
tout en silence
Les larmes glissent, inutiles,
de joie ou de compassion.
Maïa de Soles



Luc-Olivier d'Algange...écrire...


Peut-être n'écrivons nous que pour agrandir en nous le silence. La grandeur et le silence sont des privilèges et des bénédictions dans cette époque petite et jacassante.

Le livre est une approche du silence.
C'est un objet calme qui ne s'impose point, plein de courtoisie à l'égard de son lecteur, auquel il laisse toute liberté de le prendre ou de le laisser, d'en faire une aventure de l'âme ou rien du tout.

Narcisse


"Le mythe de Narcisse dévoile le destin de l'homme qui s'identifie à son propre moi.
Tant que Narcisse se contemple dans l'eau - où le ciel aussi se reflète - il demeure "vivant" dans son état bio-psychique mais, à l'instant où il se confond avec sa propre image et qu'il se penche pour l'embrasser, à cet instant-qui est celui de "la seconde mort"- il tombe et se noie. Narcisse, tourne le dos au ciel. Telle est cette posture très commune :
la vanité, l'amour infantile de soi-même, l'hypertrophie du moi, l'inépuisable passion d'être son propre sujet, de se raconter, de se donner l'illusion de son importance.

La mystique est le refoulé de la littérature parce qu'elle instaure une logique antagoniste du moi :
la désappropriation
la mort à soi-même, ce que Paul nomme "kénose".

Quand l'âme refuse de découvrir sa pauvreté ontologique, elle se détourne de Dieu.
Alain Santacreux

Une haine ?

"Plus que la haine de la supériorité, la détestation de la pauvreté est le vice le plus noir parmi les hommes : le péché contre l'esprit. Les hommes finissent toujours par mépriser ce qu'ils ne comprennent pas et, ayant oublier ce qu'ils étaient, ils ont fini par tout mépriser, jusqu'à leur propre vie.

Ce dégoût du pauvre, ils le portent en eux-mêmes comme le dégoût de la mort."
Alain Santacreu


17/08/2009

Yunus Emre


O Ami, dans l'océan de Ton amour,
je veux me jeter, m'y noyer et passer outre;
des deux mondes je veux faire un lieu de fêtes
je veux les parcourir, je veux m'y réjouir, et passer outre.

Je veux me jeter dans l'océan, et m'y noyer,
je ne veux plus être ni a, ni d, ni m,
je veux être rossignol dans le jardin de l'ami,
y cueillir les roses, et passer outre,
...

Yunus est fou de Ton amour, Seigneur,
il est le plus humble des sans-remèdes...
En Toi est mon seul remède,
Je veux te le demander, et passer outre.

de Sidi Abû Madyan (Diwan)


Vous vous êtes emparé de ma raison, de ma vue, de mon ouïe, de mon esprit,de mes entrailles, de tout moi-même.
Je me suis égaré dans votre extraordinaire beauté.
Je ne sais plus où est ma place dans l'océan de la passion.
Vous m'avez conseillé de cacher mon secret,
mais le débordement de mes larmes a tout dévoilé...

Provence secrète

Sauvagerie

07/08/2009

Au coeur de la nuit


"Au coeur de la nuit un cri a retenti
Un souffle a incendié mon coeur
dévasté qui je suis
l'Amour m'a appelée amour.

Je l'ai reconnu
Je suis brisée
par cette ombre d'aile
plus vaste
que les univers
et plus rapide que les éclairs

Un trait d'or m'a percutée
cisaillé
mon être
blessé à jamais
par la foudroyance
de sa transparence,
par ses yeux de lumière

Je ne veux plus voir
que me baigner encore
au lac d'or

Me laisser saisir
telle une proie
par les serres
du royal faucon
qui pourfend
le ciel et les terres

Il joue avec mon âme
me tient dans ses bras
me largue dans les mers
et m'envoie un chant
de pur sanglot
que je cache au secret
de ma vie égarée

J'erre comme un enfant
toujours perdue en ce monde
je vagabonde,
tout à fait inutile,
en attente,
en attente du cri."

Maïa de Soles




06/08/2009

"Soyons rebelles" avec Luc Olivier d'Algange


"Le rebelle
est étymologiquement, celui qui retourne à la guerre, mais non pas, en l'occurence, à une guerre à l'intérieur d l'Histoire, mais hors d'elle, non plus à une guerre qui est vacarme et destruction mais à une guerre silencieuse et germinative qui est celle de cette chevalerie spirituelle qui, dans un pressentiment paraclétique, doit succéder à la chevalerie héroïque.
La grand guerre sainte de l'herméneutique reconduit à une solitude orphique, et ne dispose d'autres armes que son silence et son chant.
Elle s'achemine vers le dénouement du sens, vers le pur secret du Logos.
Le rebelle, dont Jünger sut admirablement définir l'éthique, n'est pas cet agité du bocal, ce publiciste hargneux et pathétique dont la modernité nous offre tant d'exemples, mais cet homme du retrait qui ose le pas en arrière au moment des marches forcées de l'Histoire, qui s'ingénie, envers et contre tous,
à reprendre le fil de sa pensée lorsque tout conjure à la "distraction", au sens pascalien.
Dans son retrait, le rebelle retrace le chemin parcouru et précise son orientation, tout comme le marin consulte le sextant,
observe les signes du ciel
et participe, dans l'intelligence sensible,
du gonflement ou du claquement des voiles."

Luc Olivier d'Agange

pour un sourire d'enfant

Est il ou non un voyage possible ?Luc Olivier d'Algange


"Quelle immobilité voyageuse pouvons nous opposer
à la sédentarité des représentations ?
Quelle pérégrination peut surseoir à ce vagabondage
ou pire encore
à ce tourisme qui transforme
la chatoyante diversité du monde en un seul village médisant ,
Au "tout est dit"
s'oppose alors le pressentiment que tout reste à dire
précisément parce que tout est dit, et que le Dire est voyage entre le créé et l'incréé."

Luc Olivier d'Algange

Précarité


Ce fut le mot clé du soulèvement de la peur et la démonstration même de l'ensevelissement du vivant.
Peur, sécurité, nous gouvernent et nous dressent comme un mur droit sans faille, sans fissure, sans brèche pour nous parer contre le vivant.
Les gens se croient libérés en s'assurant leur vie par le moyen de l'enfermement en des cadres de plus en plus étroits et blindés.
Tout devient programmé, par groupe, par masse. Car il y a aussi la peur d'être seul avec soi, la peur de soi. Tout est prévu, en ayant surtout ôté l'audace de la surprise, ou celle ci est devenue totalement "organisée".
Surtout arracher aux gens le sens du tragique. En remplaçant des instants qui auraient pu être foudroyé par "l'éternité", par des éternels moments alignés et certifiés de bonheurs assurés et rassurants qui s'affadissent à toute vitesse à l'usure du temps qui alors égrène les secondes, les met les unes à côté des autres toutes semblables ou presque... N'y a t'il pas là, un arrière goût d'enfer ? Une création purement humaine ? Quand nous nous cachons la surprise de l'irruption d'Autre Chose...
Nous nous calfeutrons derrière notre misérable peur de la précarité, qui nous sert à accuser notre "papa à tous" à savoir "l'Etat" (sommes nous tellement adultes ?), au lieu de plonger en soi pour y rallumer le feu de la vie, qui brûle, certes, mais ô combien plus de joie que de mal, quand on le laisse vivre.

Arrêtons de vivre dans le caveau de nos assurances, mais creusons la seule certitude de notre vie, à savoir la mort. Car c'est elle qui rend l'instant imprenable.




voyage intérieur



"Le voyage intérieur,écrit Rûmî, n'est pas l'ascension
de l'homme jusqu'à la lune, mais l'ascension
de la canne à sucre jusqu'au sucre."

23/07/2009



"Toutes les choses se révèlent par leur simplicité, et il demeure au calme,
au silence.

Tout est amour : la paradis des sauvés, la damnation des damnés.

La damnation c'est de ne pouvoir aimer.
Mais lui a progressé dans le plus grand amour.

Le feu qui brûle en son coeur fait fondre toute la création.

Il embrasse avec une affection divine toutes les créatures. "les ennemis de la vérité, et le diable lui-même."

Jacques Touraille, à propos d'Isaac Le Syrien.






"Descends plus bas que toi-même,
et tu verras la gloire de Dieu en toi"

Isaac Le Syrien

Le trésor



"Efforce-toi d'entrer dans le trésor de ton coeur,
et tu verras le trésor du ciel.
Car l'un et l'autre
sont le même."
Isaac Le Syrien (VII e s.)

La pauvreté est Dieu



Dieu est le plus pauvre
Il est nu et libre

Aussi peut-on considérer avec justesse
la pauvreté comme divine
Angélus Silesius

Si Dieu



"Si Dieu est un feu,
Mon coeur en est le foyer,
où brûle le bois
de l'amour propre."
Angélus Silésius